Rue Dauphine : les survivantes...
Elles ne sont pas nombreuses les maisons havraises des quartiers 'historiques' à avoir survécu aux bombardements de septembre 1944. J'appelle 'historiques' les quartiers Notre-Dame et Saint-François, fondés dès le XVIème siècle.
Cependant, entravées entre d'autres constructions plus modernes, ils nous arrivent d'en voir quelques unes dans le quartier Saint-François. Les plus célèbres se trouvent rue Dauphine...
En 1928, Raoul Lefaix, photographe amateur mais aussi érudit passionné et éclairé, offre à la postérité un album du Vieux Havre dans lequel il n'a eu qu'un but : figer les traces du passé glorieux des quartiers Saint-François et Notre-Dame, à la fois en pleine décrépitude et bouleversés par l'urbanisme moderne. "La plupart des maisons que nous reproduisons étant appelées à disparaître ou a être modifiées dans un avenir plus ou moins proche, il nous a paru intéressant d'en fixer l'aspect avant leur disparition ou leur transformation."
Dans cet ouvrage, il nous propose donc la photographie présentée ci-dessus avec cette légende : "Rue Dauphine, n° 63 - L'immeuble portant le n° 63 de la rue Dauphine a beaucoup d'analogie avec celui du n° 19 de la même rue [que nous présentait Geo il y a quelques semaines]. Il est, cependant, plus simplement décoré que celui-ci, mais on y retrouve l'étage principal orné de balustres, mode de décoration très en honneur en notre ville dès la deuxième moitié du dix-huitième siècle."
Toutefois, alors que Raoul Lefaix n'en parle même pas, on distingue cinq maisons dans la continuité de la rue, aux numéros 61, 59, 57, 55 et 53. Si à cette époque, elles ne dégagent aucun charme particulier, noyées parmi les autres constructions d'époque, si bien qu'on ne les remarque pas et qu'elles n'ont pas droit de citer, elles ont aujourd'hui acquis une valeur inestimable car ce sont quelques unes des rares maisons de Saint-François à avoir traverser les époques, les bombardements de la Seconde Guerre Mondiale, et à nous être parvenues en l'état, encore debout et fières...
Sur cette photographie prise cet après-midi, sous le beau soleil havrais, elles étaient encore bien vivantes !
Ces belles constructions du XVIIIème siècle sont le témoignage d'une croissance rapide de la ville à cette époque, et d'un gonflement considérable de la population havraise qui passe de 14.000 à 20.000 habitants, alors que dans le même temps, la ville ne s'est pas vraiment agrandie en superficie. C'est dans les hauteurs qu'on a trouvé le remède et la possibilité de loger les nouveaux habitants havrais. J'ai déjà évoqué le phénomène dans un précédent billet sur la rue de la Halle.