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Le Havre d'avant... ou l'histoire en photo de la ville du Havre et des Havrais avant la guerre...
31 août 2008

Au Havre pendant le Siège (1/14)

"Aux Havrais qui, pendant trois dures années,
travaillèrent pour leur Ville sans se soucier d'autre chose que de servir,
et lui donnèrent tout leur coeur et tout leur courage."

Ainsi est dédicacé l'ouvrage de Pierre Courant, intitulé Au Havre pendant le Siège, souvenirs du 1er au 12 Septembre 1944...

Pendant ces premiers jours de septembre, à 64 ans de distance, je vais vous faire revivre cette sombre période qui a marqué notre ville, grâce au témoignage laissé par Pierre Courant, maire de l'époque.

Il y aura donc beaucoup plus de textes que de photographies... Celles que vous verrez seront ajoutées par mes soins mais ne figurent pas dans l'ouvrage de Pierre Courant.

J'espère que vous ne trouverez pas cet ensemble trop rébarbatif, mais je pense que ces témoignages uniques méritent d'être lus et connus.

Bonne lecture...

A00544

*********************************
AVANT-PROPOS

Nous l'avons vécu, ce siège ! Il a duré seulement dix longues journées chargées d'événements douloureux, de destructions, d'angoisses et de morts. Ensuite, est apparu le jour radieux de la libération, ces heures de suprême émotion pendant lesquelles quarante mille êtres humains qui avaient senti passer auprès d'eux le frôlement sinistre de la mort ont soudain compris que ç'en était fini des risques physiques et des peines morales et, serrés autour de ceux qui les avaient assisté dans leur misère, ont chanté pour la première Marseillaise officielle après les Marseillaise clandestines de l'occupation, acclamé à perdre la voix leurs drapeaux retrouvés et vu défiler devant eux les "feldgrau" prisonniers, bras levés et honteux.

Nous avons payé cet immense bonheur. Trois mille des nôtres, des êtres chers que nous rencontrions chaque jour dans les rues, des hommes et des femmes élevés avec nous, qui avaient partagé nos deuils et nos espoirs, n'ont vu ni l'aube lumineuse du 12 septembre ni les premiers chars alliés dans nos rues. Les uns avaient été retenus par un impérieux devoir ; d'autres, plus nombreux, étaient restés sourds à tous les conseils d'évacuation, voulant garder leur ville et leurs biens et ayant choisi de risquer leur vie dans l'espoir d'être là, dans nos rues, quand sonneraient les premiers tintements de nos cloches muettes depuis quatre années.

Parmi les morts, il n'y avait pas que des êtres humains. Il y avait, hélas ! la ville elle-même, celle que nous connaissions depuis notre enfance ; tout ce qui formait le centre, tout ce qui avait abrité le passé de quatre siècles d'histoire était transformé en un champ de ruines.

La ville était morte ; elle n'était pas seulement mutilée avec des immeubles détruits dans toutes ses rues, mais gardant au moins le tracé de ses voies, quelques maisons encore habitées et un assez grand nombre de constructions debout pour qu'on pût se souvenir du passé et espérer une prompte résurrection.

Non, la ville est vraiment morte, ville de quatre-vingt mille âmes au moins, découpée dans une agglomération de deux cents mille habitants dont ne restaient que des quartiers neufs et la plupart des faubourgs intacts. Elle avait été pilonnée par les grosses bombes au point que les décombres recouvraient les rues et qu'à peine trouvait-on une piste sinueuse à la place des larges boulevards, écrasée au point que, sur de grandes surfaces, il n'y avait même plus un pan de mur debout qui permît de situer la maison, la cave où gisait le corps d'un ami pris dans la tourmente ; elle était muette au point qu'un silence aussi complet que celui du désert y régnait, les animaux ayant été frappés comme les hommes.

Et parce qu'il y avait eu beaucoup de victimes et parce que la ville était presque détruite, la journée de la libération fut sans exubérance, presque sans joie apparente, mais ce fut aussi une grande et noble journée de fraternité où tous les hommes et toutes les femmes éprouvèrent intérieurement un même sentiment : l'amour de la Patrie retrouvée, de la France et de la Cité meurtrie, et c'est une chose assez rare pour qu'elle soit remarquée...

Le Havre a connu d'autres sièges. L'un de mes prédécesseurs, le bâtonnier Victor Toussaint, a consacré un bon livre à l'histoire du siège sous Charles IX. Pour moi, je n'ai pas cherché à faire oeuvre d'historien. Cette tâche ne pourra être entreprise que plus tard, lorsqu'il sera possible de consulter des documents, d'analyser froidement et objectivement ces événements militaires qui ne sont qu'un épisode de la foudroyante et magnifique campagne de libération.

On ne trouvera ici que des souvenirs personnels, écrits au lendemain même des journées tragiques, alors que m'étreint encore l'émotion éprouvée en voyant cette population résister si courageusement au malheur qui l'accablait.

C'est un sentiment de reconnaissance qui m'anime au moment où j'écris ces pages, reconnaissance envers tous ceux qui, avec moi, ont "servi". [...]

A eux tous, aux plus humbles surtout, à ceux dont on ne dira jamais les noms et qui forment le peuple de mon pays, merci d'avoir, en ces jours de souffrance, inscrit dans mon coeur la plus réconfortante des certitudes : la croyance que la race française reste une grande et noble race lorqu'elle abandonne ses disputes et lorsqu'elle sait préférer à la paille des mots le grain des choses.

Le 29 Octobre 1944.

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Commentaires
R
Historien de Paris I Panthéon-Sorbonne, je réalise un travail de recherches sur <br /> <br /> « Les résistants du lycée de garçons du Havre : professeurs et élèves »<br /> <br /> Je rencontre le nom de Marcel Bideau parmi les membres du réseau L'heure H dont le chef était Roger Mayer.<br /> <br /> J'étais surveillant au lycée pendant l'année scolaire 1953-1954 et je crois avoir connu Marcel Bideau. Je serais intéressé par tout élément concernant l'activité de résistant de Marcel Bideau
B
Le dernier numéro du journal clandestin l'Heure H est daté du 11 novembre 1944 ( j'en ai plusieurs exemplaires en ma possession ) - Mon père , Marcel Bideau , professeur agrégé d'Allemand au Lycée du havre pendant la guerre, a écrit dans ce journal , dont la rédaction et la parution était également animée par Roger MAYER, Professeur de Chimie au Lycée (et arrêté par les allemands en avril 44 ).<br /> Je RECHERCHE le pseudonyme de mon père, l'ignorant encore aujourd'hui, 25 ans après sa disparition,et ne pouvant, donc, identifier ses écrits dans l'Heure H.<br /> Roland Bideau<br /> 2,Chemin de la Guyonne<br /> 78490 Bazoches sur Guyonne<br /> 06 50 32 54 49
G
Excellente initiative de nous relater ces témoignages précieux en cette veille du 64eme anniversaire de la bataille du Havre.<br /> Pierre Courant fut un grand maire. Il a su parfaitement gérer la ville entre les besoins de la population et les ordres de Vichy et des Allemands. C'est aussi en partie grâce à lui que Le Havre est-ce qu'il est aujourd'hui (n'oublions pas qu'il fut ministre de la reconstruction et de l'urbanisme).<br /> Je vais suivre des billets avec attention, car j'ai toujours cherché à me procurer ce livre mais en vain !
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