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Le Havre d'avant... ou l'histoire en photo de la ville du Havre et des Havrais avant la guerre...
1 septembre 2008

Au Havre pendant le Siège (2/14)

Suite du récit de Pierre Courant, maire du Havre pendant l'Occupation...

Le début de cette série d'articles se trouve ici : Au Havre pendant le siège, avant-propos.

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Les préliminaires du siège

Vendredi 1er Septembre 1944

La Ville a pris ce matin un aspect nouveau. Beaucoup de Havrais ont exécuté l'ordre allemand obligeant la population à quitter le camp retranché avant mardi, mais la grande majorité refuse de partir. Une consigne a couru, recommandant de ne pas sortir de chez soi pour faire croire à l'ennemi que l'ordre était exécuté.

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Ces jours derniers, le centre de la ville était complètement désert ; mais, ce matin, tout a changé. Les épiciers distribuent des vivres de réserve que nous donnons à la population pour qu'elle puisse subsister dans le cas d'un combat de rues. Les gens, sortis de chez eux, ne songent plus à la consigne donnée. Les "queues", à peu près disparues depuis trois ans, sont de nouveau longues et nombreuses, notamment boulevard de Strasbourg, près de l'Hôtel de Ville ; des fenêtres de la Kommandantur, les Allemands peuvent constater qu'il reste encore beaucoup de monde et, qu'une fois de plus, la population havraise en a fait qu'à sa tête. Ce matin, d'ailleurs, des affiches d'un groupe de résistants sont apparues, qui donnent l'ordre de ne pas sortir, la libération étant proche. Ces affiches répondent aux désirs des Havrais qui, se souvenant des souffrances causées par l'exode désordonné de 1940, veulent à tout prix rester et ne se rendent pas compte, malgré nos avis, que la situation actuelle est bien plus dangereuse.

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Un incident est colporté en ville : le grand portrait d'Hitler qui ornait le grand salon de la Kommandantur gît depuis ce matin à terre, décroché, brisé et piétiné à coups de bottes, et aucun allemand ne songe à en faire disparaître les débris.

Mais dans la journée, un officier accompagné de soldats, mitraillette et grenade aux mains, s'est présenté à la Banque de France et, sous la menace, il s'est fait remettre presque toute l'encaisse de billets, trois cents millions de francs qui devaient permettre d'assurer les paiements pendant la durée du siège. Le directeur de la Banque a protesté auprès du commandant de la forteresse qui l'a éconduit. Il ne reste que vingt-cinq millions en petites coupures.

Le chef de la défense passive m'amène un de ses jeunes hommes, arrêté par la Gestapo il y a quelques jours, et dont le cas était inquiétant. Nous lui avions trouvé un alibi ; j'avais néanmoins peu d'espoir mais le désarroi est au camp de l'ennemi, et les Allemands commencent à craindre pour leurs personnes.

Les photographies sont extraites de l'ouvrage de Jean-Paul et Jean-Claude DUBOSQ : Le Havre 1940-1944, cinq années d'occupation en images, éditions Bertout, Luneray, 1995, 1998.

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Commentaires
P
>M.Devallière:votre témoignage est très émouvant et très intéressant. Merci <br /> phyll
D
Je peux vous parler du Havre…juste, juste après.<br /> J’étais alors parisien et étudiant. J’avais 19 ans.<br /> Je n’étais pas retourné au Havre depuis 1937 ou 1938 et je souhaitais y revenir, sous n’importe quel prétexte. J’avais pu me procurer, de temps à autre, aux kiosques de la Gare Saint-Lazare (j’étais banlieusard) les journaux havrais entretenant ma ferveur patriotique locale… et je suivais, entre autres informations locales censurées, la vie du H.A.C avec ses Leconte, Deshaies et Nemeur…………. Pardon pour tous les autres que j’ai oubliés, mais dont le nom doit encore être sur ma langue…, comme aussi de choses bien plus graves.<br /> Ce prétexte me fut offert par le « Service d’Eté Etudiant » qui cherchait alors des volontaires pour le déblaiement.<br /> Je m’y inscrivis.<br /> Et j’arrivai au Havre en fin-Juillet/ Août 1945, dans un groupe, après un périple assez long en chemin de fer, par l’Est, évitant Rouen et le viaduc de Barentin. Celui de Mirville était encore debout (par un miracle, ou grâce à des étais ?). Nous rejoignîmes à pied nos « cantonnements », loin vers l’est de la gare. <br /> Nous fûmes logés dans des baraques Adrian, au delà de la Mairie de Graville, un peu au dessous de la route Nationale, entre celle-ci et les voies du chemin de fer.<br /> Je me suis retrouvé en chambrée avec 2 étudiants roumains originaires de Buzau, plus âgés que moi, dont j’ignore le périple avant d’arriver là, et deux officiers de l’armée républicaine espagnole, n’ayant plus l’age des <br /> études, avec quelques autres français de ma génération. Nous formions un groupe hétéroclite mais de solide camaraderie spontanée. <br /> Notre mission consistait à décrotter des briques de récupération qui étaient destinées à la reconstruction de la ville pour des baraquements à nouveau (ou encore) provisoires, mais de construction moins fragiles que le bois….et bien plus durables. Pauvres havrais !<br /> Faute de tout moyen de transport – je ne me souviens pas, en effet, avoir une fois utilisé le tram...question d'horaires ? – je me rendis à pied dans ce Vieux Havre, entre Mairie et Quai des remorqueurs, pour retrouver des lieux de mon enfance. Même moches et tristes, même sordides, les lieux d’enfance heureuse conservent presque toujours quelques couleurs roses. C’étaient les miennes, en tous cas….<br /> Puérile illusion !<br /> Je ne trouvai que des monceaux de gravats de couleur blanche et grise, poussiéreuse, formant des collines que je franchis à l’estime tel un explorateur, dans une solitude absolue…, m’orientant à chaque sommet. C’est la vision dantesque et le souvenir que je conserve de ces explorations. Mon imagination sans doute, mon souvenir, aujourd’hui, exagèrent la hauteur métrique des restes amoncelés, mais pas, à coup sur, l’étendue immense du désastre…<br /> Je me souviens d’avoir trouvé une planche peinte en bleu, plantée dans les gravats, sur laquelle était écrit en blanc : « escalier B ». J’imaginai alors que j’étais « sur » la Gendarmerie.<br /> Je ne sais pas si je pus mesurer vraiment à ce moment la monstruosité de ces dégâts qui dépassaient par leur ampleur, et in-situ, - les touchant du doigt ! - tout ce que nous avions pu voir jusque là en région parisienne et ailleurs sans doute aussi, à Londres ou en Allemagne, par la photographie…C’était pour moi gigantesque. Complètement inimaginable. Il me semblait même impossible de concevoir que ces endroits aient pu être peuplés.<br /> Je réussis à trouver un vélo, du côté du Rond-Point, centre névralgique déplacé de la ville. Je pus aller retrouver des amis de mes parents, dispersés dans les environs, dont l’accueil fut inoubliable. L ‘accueil cauchois, non ? Un vieux couple, notamment, qui me reçut comme l’Enfant Prodigue, et me gava de nourriture en même temps qu’il me combla, lorsque je le quittai, de casses-croûte pour plus tard dont profitèrent mes copains de la baraque. Je rentrai même au camp en stop , un de ces soir là, chargé à la sortie de Montivilliers, par 4 noirs américains « très en fête ! » à bord d’un command-car roulant à tombeau ouvert sur les mauvais pavé de la route joignant Montivilliers à Harfleur. La voie était vide…………..<br /> C’est en grattant des briques que nous entendîmes, le 14 Août 1945, les sirènes nous annoncer la fin de la guerre et la reddition du Japon.<br /> L’événement ne déchaîna pas un élan extraordinaires entre nous tous. Heureux, nous le fûmes, certes, d’une joie contenue, je dirai, après quelques hourrahs ! mais qu’était-ce par rapport à la Libération, un an auparavant ? Avions-nous déjà épuisé toutes nos capacités d’enthousiasme et d’espérance ? <br /> On allait enfin entrer dans la Paix. Parlons, alors, d’un immense soulagement, comme après une trop longue et affreuse maladie. Et nous ne savions encore pas tout !
P
Ces derniers jours d'occupation sont très forts en émotions!!!<br /> ps: je possède également ces deux ouvrages de JP et JC DUBOSQ sur le Havre pendant l'occupation...je les consulte souvent, ils font partie des livres incontournables de ma bibliothèque "histoire du Havre".<br /> Bravo, continue !!<br /> à+
G
Récit angoissant. Tiens c'est ni plus ni moins ce que vivent actuellement les habitants de la Nouvelle Orléans qui attendent le cyclone Gustave.<br /> Sur ce coup là les résistants ont eu tord de dire à la population de ne pas évacuer.<br /> <br /> Ca devait faire bizard de voir Le Havre vide, sans vie, ca devait être pesant.<br /> <br /> Je me souviens d'un reportage de France 3 diffusé le 5 septembre 2004, ou une Dame qui était jeune fille à l'époque témoignait justement de cette période. Le clame plat dans la ville, sa promenade seule avec une amie dans le square Saint Roch en plein après midi et soudain contre toute attente, l'arrivée des bombardiers.<br /> J'aimerai bien revoir ce reportage, il faudrait que je demande à France 3 Le Havre si c'est possible ?<br /> <br /> <br /> <br /> PS: Aujourd'hui j'ai toruvé un bouquain estrêmement rare chez un bouquiniste havrais, un livre publié en 1946 qui présente de très nombreuses photos inédites du centre-ville en 1946. je ne manquerais pas de vous les faire partager sur mon blog.<br /> <br /> @+
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